La réforme de la TVA entamée en 2005 est poursuivie. Les dépenses de compensation et d'investissement sont réduites. L'objectif est de ramener le déficit budgétaire à 3% à l'horizon 2016 et de baisser le niveau d'endettement du Trésor.
Votée en deuxième lecture par la Chambre des représentants par 186 voix pour et 59 contre –après avoir été rejetée par les conseillers–, la Loi de finances 2014 arrive tout juste à temps pour permettre l’ouverture des crédits nécessaires au fonctionnement de l’Etat et la perception des impôts et taxes. Avec la sortie de l’Istiqlal de la coalition gouvernementale, puis la difficile et longue négociation qui s’ensuivit pour trouver un remplaçant, le risque que la Loi de finances prît du retard n’était pas à écarter. Finalement, comme on dit, il y eut plus de peur que de mal !
Quoi qu’on ait pu dire, et malgré les conditions particulières qui ont entouré son élaboration ainsi que la difficile conjoncture que traverse le pays, sur le plan financier notamment, la Loi de finances 2014 telle qu’elle a été votée (y compris donc les amendements qui lui ont été apportés aussi bien par l’opposition que par la majorité) paraît assez équilibrée. Elle se présente en effet comme un Budget qui, dans le même mouvement, se préoccupe de réduire, du moins de freiner les dépenses, sans trop peser sur le contribuable. En d’autres termes, l’Exécutif, tout en ayant le souci de réduire le déficit budgétaire, qu’il ambitionne de ramener à 4,9% du PIB en 2014, n’a pas vraiment usé de la «pompe à fric» qu’est la fiscalité. Il a préféré réduire les dépenses d’investissement (-16%) et celles des charges communes et de fonctionnement (-16,7% pour les dépenses de compensation) plutôt que d’augmenter de façon significative les impôts. Cette dernière alternative pouvant s’envisager, vu l’importance des dépenses fiscales et la nécessité de rétablir les équilibres macroéconomiques passablement rompus.
Bien évidemment, des ajustements de certains taux, notamment en matière de TVA, ont été décidés dans cette Loi de finances. Exemples : la TVA sur les graisses alimentaires (comme les margarines) et les véhicules utilitaires passe de 14% à 20%. De même, une taxe sur les billets d’avion ainsi que sur les véhicules d’une valeur dépassant 400000 DH a été instituée. En matière d’IS, l’exonération du secteur agricole a pris fin, mais cela était déjà prévu dans le code général des impôts et recommandé lors des dernières assises de la fiscalité. Mais les petites et moyennes exploitations continueront de bénéficier de l’exonération de façon totale et permanente. Seules les sociétés réalisant un chiffre d’affaires annuel égal ou supérieur à 5 millions de DH seront fiscalisées. Et encore, faut-il rappeler que dans un premier temps, on va commencer par les plus grosses (35 millions de DH de chiffre d’affaires), de sorte que celles réalisant un chiffre d’affaires de 5 millions de DH ne seront concernées par l’IS qu’à partir de 2020.
Le plus gros des dépenses fiscales concerne la TVA
A propos de la TVA, il faut bien voir que c’est la taxe à travers laquelle les pouvoirs publics ont consenti les dépenses (fiscales) les plus élevées : plus de 14 milliards de DH en 2013. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs une réforme de cette taxe a été entamée depuis 2005, avec comme objectif, à terme, de supprimer la multiplicité des taux actuellement en vigueur (soit 4 taux, et même 5 en comptant le taux zéro) pour n’en garder que deux (20% et 10% ou 12%). Ce qui implique, nécessairement, la suppression des taux intermédiaires (7% et 14%) et donc l’augmentation des prix des produits et services concernés. Maintenant, c’est évident, tout le monde ne va pas applaudir cette politique, considérant que ces ajustements vont se traduire par des hausses de prix plus ou moins importantes. La question est cependant de savoir à qui s’adressent ces hausses. Il est clair que la taxe sur les véhicules de «luxe», ou même celle sur les billets d’avion sera, en gros, payée par ceux qui ont les moyens de payer. Quant à l’augmentation de la TIC sur les vins et le tabac, tous les gouvernements de par le monde y recourent pour augmenter les recettes bien sûr mais aussi, en même temps, pour lutter contre les fléaux du tabac et de l’alcool, même si les résultats obtenus peuvent être discutés.
Cela pour dire que les aménagements de taux de TVA introduits dans la Loi de finances ne devraient ni surprendre ni étonner. C’est dans la logique de la réforme lancée voici presque dix ans maintenant. Et puis, il y a une question de cohérence qui est sous-jacente au débat sur la Loi de finances : si l’on considère que le pays doit impérativement rétablir ses équilibres macroéconomiques pour ne pas devoir passer sous les fourches caudines des institutions financières internationales, il faut nécessairement que l’Etat diminue ses dépenses. Il se trouve que parmi ces dépenses, il y a celles qui sont à caractère fiscal (appelées les dépenses fiscales). En outre, la mise à contribution de tous pour améliorer les recettes fiscales s’impose. Aujourd’hui, les contributeurs, qu’il s’agisse des personnes physiques ou des entreprises, sont peu nombreux. Le gros des assujettis sont ou bien exonérés (donc dépenses fiscales) ou bien…invisibles (secteur informel). Comme quoi, rien n’est vraiment simple...
Recettes en baisse malgré les ajustements fiscaux
Malgré les ajustements fiscaux contenus dans la Loi de finances 2014, les recettes du Budget général au cours de cet exercice devraient baisser de 6,7%, à 264,4 milliards de DH, selon les prévisions du gouvernement. Les dépenses, elles, sont en hausse de 3%, en dépit des coupes dans le budget d’investissement (-16%, à 49,5 milliards de DH) et dans l’enveloppe de la compensation (-16,7%, à 41,65 milliards de DH). C’est que la croissance en 2014, compte tenu de l’effet de base, mais aussi du prolongement de la crise internationale, connaîtra un ralentissement par rapport à 2013, quoique la sensibilité des recettes fiscales à la croissance reste encore limitée.